LX Académie

Une académie

LX Innovation, solutions pour avocats

Un lab innovation

Commissaires de justice

Une étude de commissaires de justice

Anciennement Huissiers de justice

Actualités / Articles

Concentration des prétentions et augmentation de leur quantum

Voir toutes les actualités

Publié le 12.11.2025

Solution

Lorsqu’une prétention présentée dans les premières conclusions est reprise dans les dernières avec une majoration de son montant, elle n’est recevable qu’à concurrence du montant fixé dans les premières conclusions.

Impact

Sans égard au fait que l’objet de la prétention au fond était resté le même pour ne l’envisager qu’en raison de l’augmentation de son quantum, la Cour de cassation livre une solution sévère, à la portée pratique considérable, aussi discutable juridiquement qu’économiquement.

Cass. 2e civ., 11 sept. 2025, n° 22-20.458, F-B : JurisData n° 2025-014256

[…]

Vu l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article 910-4 du Code de procédure civile dans sa rédaction antérieure au décret n° 2023-1391 du 29 décembre 2023 :

4. Selon le premier de ces textes, le droit d’accès au juge peut être limité à la seule condition que les mesures mises en œuvre poursuivent un but légitime, soient proportionnées au but visé et n’aient pas pour effet de restreindre cet accès d’une manière ou à un point tels que le droit s’en trouve atteint dans sa substance même.

5. Selon le premier alinéa du second, à peine d’irrecevabilité, les parties doivent présenter, dès les premières conclusions, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. Selon le second alinéa du même texte, demeurent cependant recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions, nées postérieurement aux premières conclusions, de l’intervention d’un tiers ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

6. Il découle de l’ensemble de ces dispositions que, sauf dans les cas prévus à l’alinéa 2 de l’article 910-4 du Code de procédure civile, lorsqu’une prétention présentée dans les premières conclusions est reprise dans les dernières avec une majoration de son montant, elle n’est recevable qu’à concurrence du montant fixé dans les premières conclusions.

7. Pour déclarer irrecevable la prétention de M. [K], l’arrêt retient, au visa de l’article 910-4 du Code de procédure civile, que c’est à tort que l’appelant demande à la cour d’appel, dans ses dernières conclusions, la condamnation de l’intimée à lui payer la somme de 11 453,91 euros qui constitue une demande financière nouvelle.

8. En statuant ainsi, alors que l’appelant avait présenté dès ses premières conclusions une prétention tendant à voir liquider et partager les communauté et indivision à une certaine somme dont il avait majoré le montant dans ses dernières conclusions, ce dont il résultait que la demande était recevable à concurrence du montant demandé initialement, la cour d’appel a violé les textes susvisés »

[…].

Sans prétention.

Commençons par la solution, « il découle de l’ensemble de ces dispositions que, sauf dans les cas prévus à l’alinéa 2 de l’article 910-4 du Code de procédure civile, lorsqu’une prétention présentée dans les premières conclusions est reprise dans les dernières avec une majoration de son montant, elle n’est recevable qu’à concurrence du montant fixé dans les premières conclusions » et confrontons -la avec la lettre de l’article 910-4 qui consacre, depuis le décret du 6 mai 2017, le principe de concentration des prétentions au fond : « à peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond ».

Premier étonnement, alors qu’elle vise l’article 910-4 du CPC applicable à la situation d’espèce, la deuxième chambre civile indique, en vertu de ce texte, qu’« à peine d’irrecevabilité, les parties doivent présenter, dès les premières conclusions, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond ». Non, les parties doivent présenter, conformément au texte, l’ensemble de leurs prétentions dans leur premier délai pour conclure, non pas dès leurs premières conclusions. C’est l’alinéa 2 relatif aux exceptions autorisant une réplique qui mentionne les « premières conclusions ». Et c’est bien là toute la différence avec le nouvel article 915-2 du CPC, né du décret du 29 décembre 2023 et applicable aux déclarations d’appel formées à compter du 1er septembre 2024, qui reprend à l’identique les termes relatifs au principe de concentration des prétentions au fond dans les délais impartis aux parties pour conclure, tout en apportant un distinguo s’agissant de l’appelant principal qui peut désormais compléter, retrancher ou rectifier dans le dispositif de ses « premières conclusions » remises dans lesdits délais les chefs du dispositif du jugement critiqués mentionnés dans l’acte d’appel. Le terme de premières conclusions est plus qu’une formule de style, il impacte la portée des conclusions et la saisine de la Cour dès lors que deux jeux d’écritures pourraient être déposés dans le délai imposé par le législateur.

Mais admettons que le principe de concentration des prétentions ne s’apprécie qu’au regard des premières conclusions, deuxième surprise, alors que l’article 910-4 du CPC vise, en ce qu’elles doivent être concentrées, les prétentions au fond, il n’est plus question dans cette solution que des « simples » prétentions conduisant la deuxième chambre civile à dire que n’est pas recevable la prétention qui voit son quantum élevé dans les dernières conclusions : « lorsqu’une prétention présentée dans les premières conclusions est reprise dans les dernières avec une majoration de son montant, elle n’est recevable qu’à concurrence du montant fixé dans les premières conclusions ». La précision a son importance puisque le principe de concentration des prétentions ne vaut que pour les prétentions au fond ainsi que le précisent les articles 910-4 et 915-2 précités et comme l’a récemment rappelé la Haute Cour au sujet des fins de non-recevoir et des défenses au fond (Cass. 2e civ., 4 juill. 2024, n° 21-20.694, FS-B : JurisData n° 2024-010398 ; Procédures 2024, comm. 222, obs. R. Laffly . –- Cass. com., 18 juin 2025, n° 24-11.243, F-B : JurisData n° 2025-009375 ; Procédures 2025, comm. 194, obs. R. Laffly ). En l’occurrence, la prétention au fond consistant à solliciter une somme à l’issue des opérations de liquidation-partage de l’indivision post communautaire était bien restée la même, seul son quantum ayant été modifié dans les dernières conclusions.

Foin de l’article 4 et de l’article 910-4 du Code de procédure civile, admettons aussi que les prétentions dans leur acception générale dépassent leur objet, troisième source de questionnement, si la prétention « est reprise » selon le mot même de la Haute Cour dans sa solution (pt 6), n’est-ce pas là la preuve qu’il s’agit de la même prétention ?

Intégralité du commentaire disponible sur www.lexis360intelligence.fr

PROCÉDURES – N° 10 – NOVEMBRE 2025 – © LEXISNEXIS SA

Publié par

Romain LAFFLY

Avocat associé

Partager l'actualité

Recevez nos actualités

Lire la suite

Publié le 29.10.2025

Articles

Incompétence de la cour d’appel : le revirement

Lire la suite

Publié le 20.10.2025

Articles

Irrecevabilité des conclusions de l’intimé et relevé d’office, la parole est à la défense

Lire la suite

Publié le 15.10.2025

Articles

Cession d’un fonds libéral en ZRR : attention à l’enregistrement pour l’exonération fiscale !