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Les étapes de la prise de date

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Publié le 01.09.2021

CONTEXTE

Dans une logique de digitalisation de la justice et d’unification des modes de saisine, la prise de date jusqu’ici réservée aux procédures orales, est désormais étendue aux procédures écrites ordinaires devant le tribunal judiciaire.

Ainsi, les décrets n° 2019-1333 du 11 décembre 2019 et n° 2020-1452 du 27 novembre 2020 intègrent les nouvelles exigences suivantes quant à la forme des assignations :

  • « L’assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de justice et celles énoncées à l’article 54 : 1° Les lieu, jour et heure de l’audience à laquelle l’affaire sera appelée […]. L’assignation précise également, le cas échéant, la chambre désignée» (CPC, art. 56).
  • « La demande formée par assignation est portée à une audience dont la date est communiquée par le greffe au demandeur sur présentation du projet d’assignation » (CPC, art. 751).

RÈGLES PROCÉDURALES

Champ d’application et entrée en vigueur

Les articles 750 à 759 du CPC nouveaux qui concernent l’introduction de l’instance par assignation ont vocation à s’appliquer aux procédures écrites comme orales, sauf mentions particulières, dès lors qu’elles figurent dans un sous-titre Ier intitulé « dispositions communes ».

Le retard dans le déploiement du dispositif et la finalisation de l’expérimentation ont justifié un premier recul de l’entrée en vigueur au 1er septembre 2020 puis au 1er janvier 2021 et enfin au 1er juillet 2021 (F.-X. Berger, La saga de l’ «assignation à date » : fin de la saison 1 : Dalloz actualités 5 janvier 2021), à l’exception de la procédure de divorce contentieux et la procédure de séparation de corps restée fixée au 1er janvier 2021.

En pratique, les modalités de la prise de date

En contraignant à assigner pour une date, la réforme oblige de facto à prendre une date auprès de la juridiction en amont de la délivrance de l’assignation.

  1. – Les moyens

Les arrêtés des 9 mars 2020 (NOR : JUSC 2001176A) et 9 août 2021 (NOR : JUSC 2124299A) relatifs aux modalités de communication de la date de première audience devant le tribunal judiciaire disposent que la communication de la date de première audience se fait « par tout moyen […] sous réserve des dispositions relatives à la procédure écrite ordinaire ».

En effet, l’arrêté du 9 août 2021 (art. 2) vient ajouter à l’arrêté du 9 mars 2020 un chapitre II rédigé comme suit :

« Chapitre II : Modalités de communication de la date de la première audience en procédure écrite ordinaire

Art. 4.- En procédure écrite ordinaire, la date de l’audience est sollicitée au moyen du système de communication électronique défini par l’arrêté du 7 avril 2009 relatif à la communication électronique devant les tribunaux judiciaires [RPVA].

La demande peut toutefois être formée par tout moyen lorsque :

1° Le demandeur, dispensé de l’obligation de représentation, n’a pas constitué avocat ;

2° La date ne peut être demandée par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui la sollicite. [Dans cette hypothèse, il est recommandé de procéder par voie papier (art. 850 CPC)]. »

Il est précisé que l’arrêté du 9 août 2021 entre en vigueur au 1er septembre 2021 (art. 3).

La nouvelle version de la plateforme e-barreau n’étant pas encore totalement fonctionnelle, il est recommandé de s’en tenir à l’ancienne version.

À noter qu’en matière de référé (procédure orale soumise à la représentation obligatoire pour les demandes supérieures à 10 000 Euros) la prise de date par RPVA reste à ce jour inchangée. Dans l’onglet « Mise au rôle », il convient de remplir le formulaire « inscription à une audience de référé ».

Pour les procédures orales sans représentation obligatoire concernées par la prise de date, la communication de la date d’audience peut se faire par courriel adressé sur la boîte aux lettres structurelle dédiée ou bien auprès du bureau d’ordre civil notamment par l’intermédiaire d’un huissier.

  1. – Les étapes 
  • Établir un « projet» d’assignation. À cet égard, se pose la question du degré de finalisation du projet et de la possibilité éventuelle de compléter celui-ci ultérieurement, notamment en ajoutant des parties et/ou des moyens ( Amrani-Mekki, Décret n° 2020-1452 réformant (encore !) la procédure civile, Des corrections sans grand bouleversement : JCP G 2020, 1404. – Prise de date, prise de tête ?, Gaz. Pal., 26 janv. 2021). Le Directeur des affaires civiles et du sceau a précisé que « cette exigence vise notamment à s’assurer du caractère sérieux de la demande et ainsi d’éviter le risque de pré-réservation massive de date d’une audience qui ne seraient pas suivies de placement » (Note envoyée aux juridictions le 9 décembre 2020 par la direction des services judiciaires et la direction des Affaires civiles et du Sceau).
  • Réserver une date auprès de la juridiction. Si le RPVA est ouvert pour ce contentieux, dans l’onglet « Mise au rôle» remplir le formulaire « Réservation d’une date d’audience » en prenant le soin de :
    • Vérifier dans le menu déroulant si la prise de date par RPVA est ouverte pour la nature de l’affaire concernée. Dans l’affirmative, cliquer pour continuer. Dans la négative, réserver la date auprès du greffe par tout autre moyen. A noter que la nature des contentieux éligibles à la prise de date électronique varie selon les juridictions.
    • Compléter le nom des parties (avec une vigilance particulière car les données seront ensuite reprises en l’état puisqu’il s’agit d’un fichier structuré).
    • Dans le menu déroulant proposé par la juridiction sélectionner les critères suivants :
      • une nature du contentieux (qui déterminera ensuite l’attribution de la chambre).
      • un « délai légal » (qui déterminera ensuite la date d’audience disponible) sans oublier de se ménager un délai supplémentaire pour la délivrance de l’assignation compte tenu le cas échéant de l’éventuel éloignement géographique d’un défendeur.
      • une date d’audience d’orientation devant la chambre à laquelle l’affaire est distribuée.
    • Joindre une version PDF lisible et complète du « projet d’assignation» (10 Mo maximum). Il n’est pas nécessaire de joindre le timbre fiscal réclamé.
    • Envoyer le tout au greffe qui va contrôler la conformité formelle du projet avant d’adresser un accusé réception dans les 24 heures ouvrées (sous forme de courrier électronique, accompagné d’un fichier .xml et du projet d’assignation) avec la mention « affaire en attente enregistrée sous le RG provisoire n°XX/AXXX». Avant toute délivrance de l’acte complété, il est indispensable d’attendre cette confirmation dès lors que la demande de date peut se solder par un refus pour divers motifs (pages incomplètes, tribunal incompétent, RPVA non ouvert pour ce contentieux, document illisible, nature erronée, etc.).
  • Procéder à la délivrance de l’assignation après avoir ajouté la date. Le cas échéant, il est utile de préciser la chambre afin de permettre au défendeur de s’orienter dans la juridiction.
  • Placer le second original de l’assignation. Adresser le second original auprès de la chambre désignée en précisant le RG provisoire. Si le RPVA est ouvert pour ce contentieux, ne pas d’utiliser l’ancien onglet de placement au fond mais passer par un « nouveau message civil» du RPVA avec l’objet « placement au fond » (ou tout autre libellé équivalent).

Les délais de placement : Conformément aux dispositions de l’article 754 du CPC, la remise doit être effectuée par la partie la plus diligente dans les deux délais ci-après :

  • 15 jours avant la date de l’audience, sous réserve que celle-ci ait été communiquée plus de 15 jours à l’avance ;
  • 2 mois à compter de la communication par voie électronique (RPVA) de la date de l’audience, de façon à permettre de libérer la date si finalement le projet n’est jamais enrôlé. Ainsi, le point de départ n’est plus la date de délivrance de l’assignation mais la date de communication de la date par le greffe du tribunal judiciaire.

Focus pratique : La communication de la date au sens de l’article 754 CPC (constituant le point de départ du délai de placement) correspond à la communication du RG provisoire par le greffe.

La sanction d’un placement tardif : Hormis le cas d’une autorisation du juge motivée par l’urgence (CPC, art. 755), celui-ci est sanctionné par une caducité constatée d’office par ordonnance du juge ou à défaut à la requête d’une partie (CPC, art. 754). En cas d’erreur, cette sanction peut être rapportée par le juge qui l’a rendue (CPC, art. 407). Le prononcé de la caducité ne fait pas obstacle à l’introduction d’une nouvelle instance, si l’action n’est pas éteinte par ailleurs (CPC, art. 385).

  • Communiquer au contradicteur le RG définitif transmis par le greffe. Le défendeur est tenu de constituer avocat dans le délai de 15 jours, à compter de l’assignation. Toutefois, si l’assignation lui est délivrée dans un délai inférieur ou égal à 15 jours avant la date de l’audience, il peut constituer avocat jusqu’à l’audience (CPC, art. 763). Ce délai de constitution n’est pas sanctionné mais le défendeur qui n’a pas constitué avocat dans ce délai s’expose à ce qu’une décision soit rendue sur la base des seules demandes et pièces du demandeur.

Quelle audience pour le premier examen de l’affaire ?

Dans le cadre de la procédure écrite ordinaire, lors de l’audience d’« orientation » (CPC, art. 776 et s.), le Président informe les parties sur la médiation et la procédure participative avant de décider si l’affaire :

  • est en état d’être jugée sur le fond (avec ou sans audience de plaidoirie laquelle peut être tenue le jour même) d’après les explications des avocats et au vu des conclusions et des pièces échangées, à moins qu’il n’ordonne la réassignation du défendeur qui n’aurait pas comparu ;
  • doit faire l’objet d’une convention de procédure participative aux fins de mise en état (CPC, art. 1546-1) ;
  • doit être renvoyée à la mise en état avant d’être jugée sur le fond.

Dans le cadre d’une procédure orale, l’affaire peut être renvoyée aux fins de :

  • Conciliation menée par le juge (CPC, art. 825) ;
  • Jugement avec ou sans audience selon la volonté exprimée des parties (CPC, art. 828).

Quid en cas d’erreur dans l’aiguillage du dossier au sein du tribunal judiciaire ?

Il est possible que le processus de prise de date ait abouti à la désignation d’une chambre incompétente susceptible de faire grief dès lors qu’elle implique des règles de procédure différentes (représentation obligatoire, caractère écrit ou orale de la procédure) mais surtout qu’elle touche à des problèmes de fond (S. Amrani Mekki, Nouvelles réformes de procédure civile – Vous avez dit simplification ? : JCP G 2020, doctr. 75).

Avant la première audience, ces éventuels conflits d’attribution peuvent être réglés de manière simplifiée, à la demande d’une partie ou d’office par le juge (CPC, art. 82-1).

Dans un premier temps, il s’agit d’un règlement administratif, par mention au dossier. Les parties ou leurs avocats en sont avisés sans délai par tout moyen conférant date certaine. Le greffe transmet en même temps le dossier de l’affaire au juge désigné. Les parties et le juge nouvellement saisi peuvent contester ce renvoi dans un délai de 3 mois. Dans ce cas, l’affaire est transmise au Président du tribunal judiciaire lequel désigne la juridiction compétente par simple mention au dossier.

Dans un second temps, après la désignation du juge par le président du tribunal judiciaire, le règlement devient contentieux. La compétence du juge auquel l’affaire aura été renvoyée de la sorte pourra faire l’objet d’une contestation devant lui et le cas échéant ensuite d’un appel à jour fixe (83 CPC).

À défaut d’avoir été identifié en amont de la première audience, le conflit ne pourra être réglé selon ce processus spécifique (CPC, art. 82-1) et l’exception d’incompétence devra être traitée en application du droit commun (CPC, art. 75).

CONCLUSION

En attendant que toutes les juridictions aient déployé le dispositif et que les avocats aient acquis les réflexes indispensables, il est certain que cette nouvelle modalité de saisine – qui se voulait simplifiée et moderne – engendre dans un premier temps un certain nombre d’incompréhensions et retards. Ce d’autant qu’une énième modification du texte ne manquera pas d’intervenir sous peu, au gré des avancées technologiques et des moyens alloués aux juridictions.

Dans l’immédiat, afin d’éviter toute mauvaise surprise, il convient de veiller à respecter strictement les spécificités mises en place localement (tant bien que mal) par les juridictions et interroger au besoin les greffes pour s’assurer que tout est en ordre.

 

PRATIQUE PROFESSIONNELLE – SEPTEMBRE 2021 – © LEXISNEXIS SA

Publié par

Marie VERRANDO

Avocate associée

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